La locomotive et le Charbon

Deux hommes en nage étaient dans la locomotive,
Travaillant, suant, couverts de noir de charbon,
A grandes pelletées dans la chaudière poussive,
Ils faisaient vivre le train au rythme des flonflons,
Et personne ne trouvait leur ardeur excessive,
Mais chacun appréciait la vitesse des wagons.

Ainsi allait le train à travers paysages,
Rapide dans les plaines et grimpant des montagnes,
Transportant les hommes, les denrées et les messages,
Et tout le monde pouvait, s'il voulait, mettre un pagne,
Quel que soit le temps et quels que soient les présages,
Car quand le convoi marche, c'est tout le monde qui gagne.

Un jour on arriva, comme il était prévu,
Dans une contrée très froide qu'il fallait traverser.
Beaucoup dans les wagons trouvèrent ça incongru,
Réclamèrent du charbon pour mieux se réchauffer,
Dépouillèrent les chauffeurs comme si c'était un dû,
Et dans des braseros, ils mirent tout à brûler.

Deux hommes perdus étaient dans la locomotive,
Ils cherchaient en vain la dernière trace de charbon
Car voulaient éviter la panne définitive
Qui vient toujours quand on n'apprend pas la leçon.
Les foyers s'éteignirent, la machine fut rétive,
Convoi bloqué, le froid gagna tous les wagons.

Copyright Jacques R. Verpeaux (Eucalion) © Droits de reproduction et de diffusion réservés - Ecrire : jacques@verpeaux.net